Ode à un féminisme anarchiste par une artiste-putain, ORLAN « Tout mon travail ou presque est entre "bordel et cathédrale" » ORLAN En 1964, ORLAN est une jeune fille de 17 ans qui s'invente elle-même, en se photographiant sur son drap de trousseau. Ce dernier a été sagement élaboré par sa mère, couturière à ses heures, épouse d'un mari anarchiste, espérantiste et naturiste qui travaille dans l'électricité. Dans son œuvre manifeste ORLAN accouche d'elle-m'aime, où elle apparaît face à son alter ego, mannequin, elle prend les poses d'une adolescente qui s'ennuie à une terrasse de café. Orlan - La Règle du Jeu - Littérature, Philosophie, Politique, Arts. Sa bouche boudeuse est relevée par un sémillant rouge à lèvres, le regard charbonneux fixe un point en hors-champ vers un horizon prometteur loin de Saint-Étienne. En attendant, ORLAN s'essaie à la poésie, elle publie un recueil pour ses 15 ans et en conservera le witz, l'esprit, tout au long de son œuvre. Elle s'ouvre au théâtre, au yoga, à la sculpture et à la peinture. Dans un joyeux bazar, elle se disperse et expérimente un répertoire de postures qui mettent à mal une certaine tradition du nu… féminin.
Orlan Par Pascale Lismonde. Réalisation: Julie Beressi. Prise de son: Thomas Robine. Avec la collaboration de Claire Poinsignon. « Je suis ORLAN, entre autres, et dans la mesure du possible » affirme ORLAN au seuil de ces cinq entretiens. Elle qui se présente comme «UN femme et UNE homme» pose son identité comme mutante. Mixte. Hybridée. Orlan accouche d elle m aime au. Iconoclaste. Avec humour, toujours. Métamorphose du corps, du visage, de soi. Comme on le découvre au fil de ces entretiens, métamorphose et hybridation sont les paradigmes d'ORLAN. D'emblée, elle impose l'art comme subversion des pressions sociales, religieuses qui font violence au corps, en particulier celui de la femme. Alors ORLAN s'accouche d'elle-m'aime. Et elle investit la totalité des champs artistiques: séries photographiques, mode, sculpture, peinture, vidéo, film, et dès le début, l'art de la performance, toujours renouvelé. Elle pose son corps comme mesure étalon en Mesu-Rages d'institutions - Centre Pompidou, Guggenheim de New-York, Musée Andy Warhol de Pittsburgh ….
Elle accouche d'une personne inerte et qui n'a pas de sexe déterminé. Cette naissance symbolise se volonté de se donner naissance afin d'essayer de se créer une nouvelle identité.
Elle distribue le Baiser de l'artiste, performance aux portes de la FIAC, scandale en 1977, en vedette en 2009 dans l'exposition Elles Pompidou du Musée national d'art moderne à Paris. « Il faut produire des effets pour engendrer des affects et ces affects créent des êtres » - tel est l'axiome baroque qui gouverne le travail d'ORLAN (1). ORLAN accouche d’elle-même. | Boite à baz'art. En 1992, son Manifeste de l'art charnel pose son esthétique comme code de déontologie: pour subvertir les standards de la chirurgie esthétique imposés aux femmes, ORLAN se lance dans une série d'interventions-performances pour « mettre de la figure sur son visage ». Contre la douleur soi-disant rédemptrice, elle revendique le « corps plaisir ». Et elle poursuit la création d'autoportraits en « ready-made modifiés » avec ses Self hybridations: l'artiste euro-stéphanoise se fait aussi précolombienne, africaine ou amérindienne…. à l'infini. Puis elle expérimente les biotechnologies dans un laboratoire australien où elle fait réaliser une hybridation de quelques cellules de son propre corps.
Quoi de plus significatif alors que de pouvoir, à l'occasion du Mois de la Photo du Grand Paris, plonger dans le Manifeste artistique polymorphe de l'artiste à travers deux expositions, respectivement à la Maison Européenne de la Photographie (jusqu'au 18 juin) et à la Galerie Michel Rein (jusqu'au 22 juillet). Etude documentaire, Le Drapé, Le Baroque, Palazzo Grassi, Venise, 1979 © ORLAN Le corps est la matrice de ORLAN, son étendard artistique. Orlan accouche d elle m aime se. C'est dans et hors de cette enveloppe organique, symbole de pressions tant sociales que culturelles que l'artiste opère. Elle engendre une quête de ré -appropriation de son corps, qui devient dès lors le lieu d'inscription de son action artistique et féministe. En 1979, ORLAN exécuta une performance d'une durée de 2h30-3h organisée par Jorge Glusberg (directeur du Musée National des Beaux-Arts de Buenos Aires), dont l'étude documentaire Le Drapé, Le Baroque, Palazzo Grassi et autres sculptures de plis est présentée à la Galerie Michel Rein. L'ensemble des photographies, regroupé dans deux salles rythmées par une vidéo et une sculpture de l'artiste, nous guide au fil de la performance, de l'habillage de ORLAN par des assistants à sa mise en scène dans le Palazzo Grassi jusqu'à sa disparition dans une barque l'attendant au bout du ponton des bateaux.
ORLAN va jusqu'à une limite, celle de l'outre-portrait. Les self-hybridations, à partir de la fin des années 90 réalisent une nouvelle variation du moi corporel (le moi fondamental), en figures civilisationnelles ou artistiques. Orlan accouche d elle m aime d. Il s'agit de figurer, de défigurer et de refigurer et par là même concevoir une nouvelle iconographie qui peut passer par des media divers: montages, photographies, logiciels… L'art d'ORLAN tient du baroque religieux, du grotesque assumé et de la parodie. Son texte de manière chronologique montre les échos entre le vécu et l'œuvre en dévoilant toutes les dimensions de son entreprise: les amours, le monde des galeries, les rencontres fructueuses, les complicités esthétiques, les projets à venir après les confinements. Le livre est à la fois récit de vie d'artiste et recueil d'œuvres marquantes qui ne sont pas simples illustrations en lien direct avec la page mais petit fascicule coloré au centre du volume, comme si le lecteur ou la lectrice pouvait choisir son propre cheminement: aller de l'avant ou revenir, sur ses pas, reconnaître.
Dora Maar que Picasso a fait beaucoup pleurer, comme le prouvent toutes ses œuvres qui s'intitulent La Femme qui pleure… L'idée, en mélangeant des éléments de mon visage à ceux de Dora Maar, et donc en m'identifiant à cette muse, est de faire de ces femmes objets des sujets. De provoquer un certain déclic, une prise de conscience de l'horreur de pleurer à cause de l'homme avec qui on vit… Lire aussi À Beyrouth, le premier Festival international des féminismes Comment avez-vous pris conscience de votre corps, vous qui en avez fait le cœur de votre œuvre, depuis votre légendaire « Carnal Art Manifesto » (vos opérations chirurgicales-performances) jusqu'à vos ORLANoïdes, des robots à votre image? C'est un peu comme la Renaissance, les choses ont fait corps progressivement. ORLAN : J’aurais bien aimé ne pas avoir le souci d’être féministe ! - L'Orient-Le Jour. En même temps, j'ai eu la chance de faire partie...