Sur le tournage d'UN MOMENT d'ÉGAREMENT - YouTube
Un moment d'égarement (Claude Berri, 1977) Article écrit par Fruit défendu. Fidèle à quelques réalisateurs fétiches, Jean-Pierre Marielle l'aura été aussi à Claude Berri qui l'aura dirigé dans quatre films: Le Pistonné (1970), Sex-shop (1972), Uranus (1990) et, en 1977, Un moment d'égarement. L'intrigue – celle d'une liaison interdite portant préjudice à une longue amitié – étant ici ténue, Berri peut se concentrer à loisir sur ses deux personnages principaux et leurs interprètes respectifs, à savoir Victor Lanoux et Jean-Pierre Marielle. Intimiste Par son format déjà, 1h17, Un moment d'égarement affiche une certaine modestie, que l'on retrouve dans le resserrement des personnages, des lieux et de l'histoire. L'épouse et l'ex-épouse des deux amis n'apparaissent pas et on n'entend même pas leurs voix, ce qui rend tangible un manque affectif assez criant pour les deux hommes esseulés. On a aussi comme le sentiment d'un film de vacances capté à la dérobée. La mise en scène, exempte de découpages sophistiqués, va dans ce sens.
« Aidé » par Lisa Azuelos à l'écriture du scénario, Richet tentera de s'extirper du film de mœurs et de la réflexion sur le couple en utilisant l'humour. Le personnage joué par Cluzet ne parvenant jamais à décoder les volontés pourtant claires de sa femme, il est rapidement détourné pour représenter le dindon de la farce. Force est de constater que la plupart des gags autour de lui fonctionneront à merveille, contribuant à donner une espèce de légèreté à un film qui aurait rapidement pu sombrer dans un contexte malsain ou dans le pathos. On regrettera quelques tirades machistes d'un autre temps (1977, peut-être? ) ou encore la caractérisation sommaire des adolescentes. Alice Isaaz est d'ailleurs clairement sous-exploitée ici, au vu de son potentiel et de la justesse de son jeu. Vincent Cassel, en mâle désireux de tout contrôler, est presque parfait, tandis que Cluzet cabotine mais assure l'essentiel, handicapé par un personnage écrit à la truelle. La jeune Lola Le Lann, dont c'est la première apparition à l'écran, peine à incarner son personnage.
Toutefois, le sujet étonna suffisamment les Américains pour les pousser à en faire un remake. Sept ans plus tard débarqua C'est la faute à Rio réalisé par Stanley Donen avec Michael Caine et la toute jeune Demi Moore. Belle affiche mais pour un film qui fut vite oublié (37 000 entrées en France! ). Le ton y passait de la comédie dramatique à celui de la comédie de boulevard. Et voici qu'en 2015 apparaît un autre remake, français celui-ci, produit par le fils de Claude Berri et interprété par François Cluzet et Vincent Cassel. Même thème: la séduction d'un homme mûr par une jeune fille; même climat: les vacances d'été; mais décor légèrement différent puisque l'on passe des plages de Saint-Tropez à celle de la Corse. Au final: un remake assez fidèle. « On a revu le film de Berri ensemble pendant la préparation, explique Cluzet, et j'ai été scotché par le jeu de Lanoux. Donc j'étais content de reprendre son rôle. Mais si ça étonne encore au cinéma c'est tout à fait normal au théâtre: on est habitué de reprendre des rôles.
Il gifle aussi sa fille après une arrivée nocturne et se montre sévère avec elle. Marielle arrive pourtant à augmenter son capital sympathie en ami fidèle et père aimant malgré des erreurs manifestes actuelles et passées. Il finit également par assumer son acte et faire en fin de compte preuve d'un certain courage. Il ne s'agit pas de l'excuser, mais de le rendre compréhensible, humain, proche de nous. Marquante est aussi la scène lors de laquelle, dans un contexte critique et grave, il reste tout de même jovial et courtois au téléphone avec la femme de son ami en séjour au Club Méditerranée à Agadir, lui glissant même: « Elle est pas trop dégueulasse la nourriture? » Entre deux tons Le sujet aurait pu donner lieu à une tragédie, mais Berri ne fait pas ce choix, lui préférant une oscillation entre douceur et amertume. La gravité de l'acte est comme compensée par l'absence de jugement de la part du réalisateur, tout comme l'insouciance de l'été, et l'humanité, donc, du personnage de Jean-Pierre Marielle.
Discrète, voire imperceptible, elle fait le choix de plans-séquences fluides sans grossissements ni effets. Seul un arrêt sur image final apparaît comme un choix de mise en scène plus visible, dans une optique générale de sobriété. En retenue Les acteurs concourent aussi à cette sensation de naturel, à l'image surtout de Marielle. Celui-ci adopte dans ce film un jeu tout en retenue, à l'opposé des numéros pétaradants auxquels il a habitués son public; il y fait montre d'un naturel qui ne se vend pas, où rien ne semble calculé ou forcé, un jeu qui ne veut pas impressionner, mais qui, par là, impressionne. Dès l'ouverture, l'absence de théâtralité, un comble pour un comédien d'ordinaire si théâtral, frappe: une composition invisible, un hyper-réalisme troublant, et des phrases parfois articulées avec nonchalance. Marielle tranche ainsi également avec Lanoux, à qui il est donné l'occasion d'un jeu plus extériorisé: colère noire, coups et souffrance. Un rôle physique C'est pour Marielle aussi un rôle physique, dans lequel son corps musclé, objet du désir de la jeune adolescente, est mis en valeur.